ACT Thérapie d’acceptation et d’engagement – Hexaflex

La Thérapie d’Acceptation et d’Engagement (de l’anglais Acceptance and Commitment Therapy, ACT) est une thérapie issue de la philosophie contextualiste et de la théorie des cadres relationnels.

Elle considère que la plupart des problèmes rencontrés par un individu est liée à (1) l’évitement expérientiel, (2) un usage excessif des règles au détriment des contingences environnementales pour guider le comportement et (3) un manque de clarté concernant les valeurs personnelles fondamentales ainsi qu’un déficit de l’habileté à s’engager dans leur direction.
D’une manière générale, la mission du thérapeute ACT est de diminuer l’impact de la fusion cognitive et des règles verbales au profit d’un contact avec l’expérience psychologique directe, sans besoins de se protéger, et d’encourager les actions en direction des valeurs choisies par la personne.
L’agenda de contrôle ACT est centré sur des dimensions du comportement qui peuvent être directement changées, comme les comportements ouverts ou les situations dans lesquelles la personne se trouve et moins sur les dimensions inaltérables du comportement, comme l’histoire personnelle, les pensées automatiques et les ressentis.
L’ACT partage quelques points communs avec les thérapies expérientielles telles que l’Approche Centrée sur la Personne, la Gestalt, la Logothérapie, le Focusing et certaines techniques utilisées en sont directement inspirées. Cette ouverture clinique n’empêche cependant pas l’ACT d’ancrer toutes ses interventions dans un contexte théorique comportementaliste et de choisir ses outils pour leur pertinence dans ce contexte.

 L’ACT est un processus thérapeutique qui a montré son efficacité pour un ensemble étendu de problématique allant de la phobie simple (Zettle, 2003) au cas complexe de la schizophrénie (Gaudiano & Herbert, 2006 ; Pankey & Hayes, 2003) en passant par l’arrêt tabagique (Gifford, Kohlenberg, Hayes, Antonuccio, Piasecki, Rasmussen, Palm, 2004) ou encore la douleur chronique (Wicksell, Dahl, Magnusson, & Olsson, 2005). L’ACT stimule différentes compétences chez le client que l’on peut résumer dans le modèle de l’Hexaflex.

 

L’Hexaflex

hexaflex

L’Hexaflex est un hexagone dont les 6 cotés représentant les 6 dimensions de l’ACT. Ces 6 dimensions sont toutes interreliées. Ces 6 dimensions ont chacune deux facettes : l’une participe à la problématique de la personne, l’autre participe à sa remise en mouvement.

La première dimension est le rapport au temps. D’un côté, nous avons une tendance à centrer son attention sur le passé ou le futur qui se manifeste dans la rumination, l’organisation, la planification, l’inquiétude, la distraction, la dissociation et la vigilance. De l’autre, nous avons une habileté à porter son attention sur l’instant présent, ici, maintenant. Cette habileté est mobilisée dans les activités comme la méditation et le sport. L’habileté à porter son attention sur ce qui se passe ici et maintenant augmente la sensibilité aux contingences de renforcement et diminue la vigueur des règles pouvant gouverner les comportements.

La deuxième dimension se rapporte à la façon dont nous rencontrons notre expérience. Le dualisme entre l’approche et l’évitement de l’expérience est mis en évidence. L’évitement expérientiel représente les tentatives de contrôle ou d’évitement des événements intérieurs labellisés comme négatifs ou considérés comme aversifs. L’approche expérientielle, l’acceptation ou encore l’expansion (Harris, 2010) se caractérise par une attitude d’ouverture, de bienveillance, de non-contrôle, d’exploration et de curiosité par rapport à l’expérience intérieure, quelle qu’elle soit. Le mot «acceptation» n’est pas un synonyme de résignation, au contraire. L’approche, l’acceptation active, l’expansion du contact avec l’expérience vécue, quel que soit le nom qu’on lui donne, est l’une des clés du travail thérapeutique, car elle permet de changer les réseaux de relations en lien avec les événements évités par ajout d’expériences nouvelles.

Le rapport aux pensées est mis en évidence dans la troisième dimension. La fusion est la tendance à considérer de façon littérale ses pensées, c’est-à-dire considérer leur contenu comme une représentation de la réalité. La défusion est l’habileté à considérer ses pensées comme des pensées, produit de l’interaction entre un organisme ayant une histoire d’apprentissage particulière et un environnement particulier présentant certaines caractéristiques. Fusionner avec ses pensées revient à considérer le monde à travers les lunettes de l’intelligence «émotionnée», c’est-à-dire sous l’influence d’un état particulier, sélectionnant les pensées et les informations disponibles tant internes (souvenirs) qu’externes (éléments de l’environnement) en cohérence avec cet état et considérer ce produit comme la réalité, non comme une production dépendante de nombreux facteurs internes et externes. Défusionner de ses pensées revient à considérer l’événement interne pour ce qu’il est : un événement interne, une pensée, un souvenir une image mentale.

Le rapport que l’on entretient avec le concept de Soi est la quatrième dimension du modèle. L’approche comportementale du concept de Soi (voir Barnes-Holmes, Hayes, & Dymond, 2001 pour une discussion riche à ce sujet) propose de distinguer trois types de concepts de Soi : le Soi comme contenu, le Soi comme processus, le Soi comme contexte. Le Soi comme contenu, ou Soi conceptualisé, fait référence à l’ensemble de propositions verbales à propos de soi que l’on développe en dérivant des relations d’évaluations concernant notre façon d’interagir avec le monde, en comparaison à ce que nous avons déjà fait et ce que fait ou a déjà fait autrui. Ces propositions peuvent être positives («je suis une personne sur qui on peut compter») ou négatives («je suis un gros nul, capable de rien, une erreur de la nature»). Le Soi comme contenu est le sens de soi le plus accessible. Il est ce qu’on dit de nous aux autres et à nous même. Il est verbalement très élaboré, socialement renforcé et rigide. Lorsqu’une histoire est acceptée par la communauté verbale, son changement est potentiellement puni (ex. A partir de demain, je vais m’appeler « Marc » et plus « Egide » …). Le Soi comme contenu peut alors agir comme un piège s’il se développe dans une direction négative et auto-dépréciative. Pour prendre une image, on pourrait considérer le Soi comme contenu comme un nuage. Le Soi comme processus, ou Soi connaissant, ou Soi comme processus en cours, fait référence à la conscience de soi, de la pensée, des ressentis. Le Soi comme processus place la conscience au niveau de ce qui est en train de se passer. C’est ce concept de Soi que l’on entraine lorsque l’on propose aux clients d’observer leurs pensées ou  leurs émotions. Le Soi comme processus serait la météo : le processus impliquant les nuages. Le dernier aspect du Soi, le Soi comme contexte ou Soi transcendant, ou Soi observateur est le plus difficile à expliquer avec des mots. Il s’agit d’une expérience de Soi en train d’observer ce qui se passe, en train de faire l’expérience, en train de … . Imaginez que je vous demande de me raconter ce que vous avez fait lors de votre dernier anniversaire. Prenons les cadres déictiques suivants pour décoder ce qui va se produire JE-TU, ICI-AILLEURS, MAINTENANT-PASSE/FUTUR. Vous (JE) allez me raconter (ICI – MAINTENANT) ce que vous (JE) avez fait lors de votre dernier anniversaire (AILLEURS – PASSE/FUTUR). La personne qui parle est toujours le JE. Le Soi comme contexte fait référence au JE qui fait constamment la discrimination entre ICI-MAINTENANT et AILLEURS-PASSE/FUTUR. JE est le Soi qui était constamment là à chaque moment de notre vie. Il s’agit du concept de Soi le plus proche de la spiritualité. On le retrouve également dans différentes philosophies ou religions. Il s’agit d’un Soi comme conscience pure, pas uniquement de ce qui est en train de se passer comme c’est le cas dans le Soi comme processus, mais aussi de la conscience de cette partie de nous qui est consciente. Le Soi comme contexte serait donc … le ciel.

Les valeurs personnelles font l’objet de la cinquième dimension de l’ACT. Les valeurs sont les qualités désirées des actions que nous entreprenons. Les clarifier est essentiel car, en tant qu’augmentals, elles influencent les Opérations Constituantes de notre comportement : Clarifier ce que nous désirons faire dans notre vie revient à clarifier les augmentals naturels pour nous. Les rendre conscient a un effet d’altération du comportement ou de la valeur des conséquences de nos comportements. En d’autres termes, Les rendre conscient facilite l’engagement dans des actions allant dans leur direction. Une valeur est à distinguer d’un objectif. Une valeur est un concept verbal qui ne peut être qu’incarné dans l’action, comme être disponible, à l’écoute, aimant. Un objectif est une action concrète, réalisable, ayant un début et une fin comme faire un repas, composer un bouquet de fleurs. La différence valeur et objectif est de la même nature que celle entre «être» et «faire». Un objectif est fonctionnel dans la mesure où il nous permet d’incarner une valeur. Sa réussite importe peu. Ce qui compte, selon l’ACT, c’est d’avoir eu l’occasion d’incarner la valeur sous-jacente à la réalisation de cet objectif. Cette distinction est importante, car elle permet de se positionner dans l’action et non dans la réussite. Cela permet de mettre l’individu dans une position où il a davantage de contrôle sur sa vie : On contrôle ce qu’on fait avec ses mains, ce qu’on dit avec sa bouche et les endroits où nous mènent nos pieds. On ne contrôle pas la réussite de nos objectifs, la seule chose que l’on contrôle c’est d’y travailler ou pas. Ce changement de perspective ramène dans les mains de l’individu le contrôle de ses renforcements dans la mesure où c’est l’action d’incarner une valeur qui est proposée comme renforcement, non la réussite de l’objectif. Dans l’ACT, une valeur n’est pas quelque chose de fixe. C’est un processus, une action. Le terme anglais est «valuing» et une traduction plus exacte que valeur serait «valuer». On donne de la valeur à quelque chose. On choisit ses valeurs, mais pas sur base d’un jugement verbal. L’objectif du thérapeute ACT, ici, est de permettre au client de se libérer des règles verbales pour donner un sens à sa vie. «Valuer» est un comportement que le thérapeute tente de mettre sous le contrôle des contingences environnementales de manière à éviter, autant que faire se peut, la fusion avec une valeur. Choisir, c’est essayer et non raisonner ou justifier.

Les actions engagées sont les actions menées en direction des valeurs. Une action engagée revient à faire ce qu’il faut pour vivre une vie qui a du sens, en accord avec ses valeurs «choisies». Elles sont de deux sortes : l’une correspond à poursuivre un objectif, l’autre correspond à se réorienter vers une valeur. Se poser la question de savoir si notre action est en direction d’une chose importante pour nous est déjà une action engagée. Une notion souvent liée à l’action est l’envie. L’ACT distingue l’envie de la bonne volonté, du fait d’être d’accord de faire. Une limite importante de l’envie est qu’elle est parfois considérée comme un stimulus discriminatif essentiel à l’action. Cette perspective met le comportement sous le contrôle du stimulus (verbal ou non) avec les conséquences que cela entraine : le comportement s’installe dans une dynamique répondante, l’individu réagit à son environnement au lieu d’agir dessus. L’ACT propose de poser le comportement dans une dynamique opérante, en diminuant l’impact du stimulus «envie» au profit de la «bonne volonté» à réaliser une action, et ce, au service de se mouvoir en direction d’une valeur importante aux yeux de la personne.

La flexibilité psychologique

Les dimensions du modèle sont interreliées. Ce qui les relie est la flexibilité à laquelle elles participent toutes. La flexibilité psychchologique est l’habileté à être présent, pleinement conscient et ouvert à l’expérience de soi et de son environnement, en accomplissant des actes guidés par les valeurs (Harris, 2009). Traduit comme ça, l’augmentation de la flexibilité psychologique est au centre des interventions ACT. Plus les capacités à être pleinement conscient, à être ouvert à l’expérience, et à agir d’une façon cohérente à ses valeurs personnelles sont développées, plus grande sera notre capacité à répondre de façon flexible et adaptée aux challenges que pose la vie sur notre chemin, plus grande sera notre qualité de vie. De plus, en s’engageant dans la vie en se laissant guider par les valeurs personnelles, il se développe un sentiment de que la vie à un sens, un but et est expérimenté de la vitalité. Le mot vitalité, très utilisé en ACT, n’est pas un sentiment mais un sens d’être pleinement en vie et de l’embrasser pleinement ici et maintenant, peu importe ce que l’on est en train de ressentir. Il y a autant à se réjouir de la peine que je la joie, car chacune est une manifestation de la Vie.

Sur le plan conceptuel, l’Hexaflex est complet et il a été mis en forme par les initiateurs du modèle thérapeutique de l’ACT. Cependant, ce n’est pas le seul modèle sur le marché.

Egide Altenloh
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