Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la santé mentale est “un état de bien-être dans lequel l’individu réalise ses propres capacités, peut faire face au stress normal de la vie, peut travailler de manière productive et fructueuse, et est capable d’apporter une contribution à sa communauté”.
Pourquoi je vous parle de ça ? Car cette définition a fait bondir tout un ensemble de psys de tous poils. Les raisons sont multiples et je vous laisse aller les lire dans leur article (court, seulement 3 pages, mais d’une portée exceptionnelle avec plus de 900 autres articles qui le citent).
Les auteurs de cet article proposent une définition alternative, plus proche de l’expérience humaine de ce qu’est être en bonne santé mentale :
“ La santé mentale est un état dynamique d’équilibre interne qui permet aux individus d’utiliser leurs capacités en harmonie avec les valeurs universelles de la société. […]”
Je vous épargne la suite, non pas qu’elle ne soit pas intéressante, mais que c’est un point particulier qui a attiré mon attention : les valeurs universelles de la société.
Ils ont de l’ambition non ? Sont-ils prétentieux ? Comment peuvent-ils prétendre connaître les valeurs universelles de la société ? Et bien, figurez vous que leur raisonnement tient la route. Une de leur critique principale de la définition de l’OMS est qu’elle est culturellement orientée et très “nord-américaine” pour le coup. Tout comme le sont nos plats nationaux ou encore les recettes des diététiciens. Par contre, toutes les cultures s’accordent pour reconnaître dans l’alimentation certains invariants, comme l’importance des vitamines et des 4 grandes classes d’aliments. Pourquoi n’en serait-il pas comme ça aussi pour les valeurs ?
Et en lisant ce qu’il entendait par Valeurs Universelles de la Société, je n’ai pas pu faire autrement que d’adhérer… Je vous mets ici un extrait traduit du passage :
Les valeurs auxquelles nous faisons référence sont les suivantes : respect de soi et soin de soi et des autres êtres vivants ; la reconnaissance des liens entre les personnes ; le respect de l’environnement ; le respect de sa propre liberté et de celle des autres.
Un mot semble dominer la question des valeurs : respect.
Chapeau bas.
Même si la notion de liberté devrait également être définie, car elle est elle aussi culturellement variable, on ne peut que respecter la proposition (sans mauvais jeu de mots).
Mais le respect, en particulier le respect de soi, qu’est-ce que c’est ?
Définir le Respect de Soi
Se respecter semble tellement évident qu’on n’en parle pas. Cependant, sans respect, vous pourrez faire tous les stages que vous souhaitez, lire tous les livres disponibles, assister à toutes les conférences possibles, vous n’arriverez qu’avec difficultés à atteindre cette harmonie tant recherchée.
Le respect n’est pas de l’estime de soi. L’estime de soi est dépendante d’une évaluation positive de ses réalisations, de ses compétences ou tout simplement de soi-même. Or, bien que nous rencontrions parfois le succès dans nos entreprises, nous essuyons également des échecs. Une des principales problématiques liées à un excès de valorisation de l’estime de soi dans notre société est l’émergence d’une génération de narcissiques décomplexés.
Le respect n’est pas de la compassion pour soi. La compassion est cet amour inconditionnel dont nous avons besoin dans les moments sombres de notre vie, cette tristesse authentique et soutenante pour soi. Si on n’y prend pas garde, la compassion pour soi peut assez vite tourner en complaisance envers soi-même, ce qui n’aide pas à déployer son potentiel.
Le respect n’est pas de l’amour pour soi. L’amour pour soi, est cette appréciation affective que nous avons à propos de nous, quoi que nous fassions, quoi qu’il nous arrive. Bien que beaucoup de gens en manque, un excès d’amour pour soi peut mener à des comportements socialement divergents et dangereux pour autrui.
Le respect de soi est la reconnaissance de notre valeur intrinsèque inaliénable, la reconnaissance que nous avons quelque chose d’intéressant à partager et aussi la reconnaissance de nos limites, de nos faiblesses, de nos erreurs, de nos banalités. Le respect de soi est également le traitement que nous nous réservons à nous-mêmes. S’engager dans le chemin du respect de soi n’est pas aussi joyeux que sur celui de l’amour de soi. Ce chemin est moins doux que celui de la compassion pour soi. Et il est moins à la mode que celui de l’estime de soi. Ce chemin est pourtant celui qui parle le plus aux personnes que j’accompagne dans la mesure où il semble plus “réaliste” concernant qui nous sommes, plus proche à atteindre pour les personnes qui sont loin dans le dénigrement de soi. Le respect est non seulement le socle de toute relation fonctionnelle à soi-même mais aussi à autrui.
Les avantages du Respect de Soi
Quels sont les avantages du respect de soi ? Ne vaut-il pas mieux de se concentrer sur l’estime de soi, ou la compassion pour soi ? Vous allez très vite comprendre que, en fait, toutes ses belles qualités et compétences qui remplissent les poches des gourous du développement personnel ont un socle commun… Je vous laisse deviner lequel.
- Le bonheur intérieur : les personnes qui se respectent comprennent qu’elles doivent d’abord regarder en elles-mêmes pour découvrir leur valeur, leur estime et leur bonheur. En conséquence, leur vie est plus stable et épanouissante que celles qui se comparent aux autres ou qui dépendent de sources externes de validation.
- L’engagement à respecter ses valeurs personnelles : les personnes qui se respectent sont au clair avec les valeurs et les principes qui guident leur vie. Elles sont souvent prêtes à tout miser pour respecter leurs piliers et leurs fondations, car leur valeur et leur sens de soi en dépendent. Cela implique de prendre la responsabilité de ses actions et de ses choix. De prendre la responsabilité de ses erreurs. De prendre la responsabilité de la façon dont nous vivons le temps qui nous est imparti.
- La capacité à établir des limites : le respect de soi exige que les gens aient la force d’établir des limites et de les défendre lorsqu’elles sont menacées. Se respecter suffisamment pour défendre ses croyances et ses limites est le moyen le plus simple de se faire respecter des autres.
- Un fort sens de la dignité : se respecter soi-même signifie avoir un fort sens de sa propre dignité. La dignité implique également de respecter autrui tout autant que soi-même. C’est la beauté de la dignité : elle est à la fois intrapersonnelle et interpersonnelle. Ces deux dimensions ne sont pas séparables. Il ne peut y avoir de dignité personnelle sans respect de la dignité d’autrui.
Les conséquences d’un faible respect de soi
Au-delà des premières images que nous pouvons avoir en tête lorsqu’on évoque un faible respect de soi ou encore de se manquer de respect, nous pouvons souligner plusieurs conséquences gravissimes d’un faible niveau de respect de soi.
- Dépendance à la validation externe : les individus ayant un faible respect de soi permettent aux autres de les définir, plutôt que de se définir eux-mêmes. Ils sont plus préoccupés par la façon dont les autres les perçoivent que par ce qui compte réellement pour eux, et mènent souvent une vie qui ne leur correspond pas. Ils ont un besoin constant de validation externe et ont tendance à vouloir plaire à tout le monde.
- Vivre une vie sans grand intérêt (pour soi-même) : les personnes qui manquent de respect pour elles-mêmes se soucient peu de leurs valeurs intrinsèques et du sens de leur vie. Elles peuvent être impulsives, irresponsables, dépendantes des autres et autodestructrices.
- Avoir une vision négative de soi : ceux qui ont un respect de soi limité sont plus susceptibles de développer une vision négative d’eux-mêmes,ce qui peut les amener à cultiver un discours autodévalorisant, voire destructeur à propos d’eux-mêmes.
- Développer des relations malsaines : une vision équilibrée et saine de soi-même et une bonne dose de respect de soi et de l’autre sont des ingrédients importants dans des relations saines. Sans cela, les gens ont du mal à se défendre et à maintenir leurs limites tout autant qu’à respecter les limites d’autrui. Le manque de respect de soi est souvent renforcé avec le temps, et les gens se retrouvent coincés dans des situations malsaines, comme des relations abusives ou manipulatrices, qu’elles en soient la victime ou l’assaillant.
Les origines du Respect de Soi
Le respect de soi se nourrit de nombreuses dimensions de la vie notamment les interactions sociales, les expériences personnelles, les valeurs culturelles et les normes sociales. Voici quelques-unes des principales sources qui peuvent contribuer à la formation du respect de soi :
- Socialisation et éducation : le respect de soi commence souvent dès l’enfance, à travers l’éducation reçue de la famille, des enseignants et de l’environnement social. Les interactions et les messages reçus pendant cette période peuvent avoir un impact significatif sur la manière dont on se perçoit et se valorise.
- Expériences personnelles : les expériences vécues jouent un rôle important dans le développement du respect de soi. Les succès, les échecs, les défis surmontés, les relations interpersonnelles positives ou négatives, ainsi que les moments de reconnaissance et d’appréciation peuvent influencer la perception de soi et renforcer ou déforcer le respect de soi.
- Environnement culturel et social : les valeurs, les normes et les attentes de la société dans laquelle on évolue peuvent également façonner le respect de soi. Les cultures et les sociétés qui encouragent l’individualité, l’autonomie, l’expression de soi et le respect des droits de chaque individu tendent à favoriser la dimension égotique du respect de soi. “Si je me respecte, les autres me respecteront”. Les cultures encourageant l’interdépendance, l’humilité, le collectif auront tendance à favoriser la dimension du respect d’autrui. “Si je respecte les autres, je me respecterai”. Oui, dans un cas comme dans l’autre, pour arriver à un respect de soi sain et complet, il faudra travailler un peu plus la dimension “faible” de notre culture.
- Modèles et influences sociales : les personnes qui nous entourent, comme les parents, les mentors, les amis et les figures d’autorité, peuvent servir de modèles de comportement et nourrir ou appauvrir le respect que nous avons pour nous-mêmes. Les interactions avec ces personnes et les comportements observés peuvent avoir un impact significatif sur la manière dont on se perçoit et on se traite.
- Réflexion et développement personnel : le respect de soi peut également être le résultat d’une réflexion personnelle, d’une introspection ou d’un travail sur soi. En remettant en question nos croyances limitantes, en cultivant une distance saine avec nos pensées et nos émotions, on peut développer un respect de soi plus solide.
Comment améliorer son Respect de Soi ?
Êtes-vous convaincu de l’intérêt de développer le respect de soi ? Mais comment peut-on s’y prendre ? Il y aura bien un groupe thérapeutique made in Psyris un jour qui va spécifiquement travailler sur cette dimension (encore un peu de patience…). Mais d’ici là, voilà déjà de quoi vous mettre l’eau à la bouche.
- La première étape est de faire le deuil que vous serez un jour quelqu’un de parfait au sens où vous arriverez à tout faire à un niveau de compétence ultime. Vous n’êtes ni superwoman ni superman. Vous êtes vous. Et croyez-moi, c’est déjà bien assez. Un jour, j’ai posé la question à mon épouse : “ penses-tu que ce serait bien qu’un autre Egide soit sur terre ?” Et, à son regard, j’ai compris qu’un seul était déjà bien assez.
- Ensuite, il faut repérer ce qu’il y a de bon en vous. Que savez-vous faire ? Rien n’est pas une réponse. Vous êtes doué pour quelque chose, et pas seulement pour vous dénigrer, croyez-moi.
- Ensuite, il est nécessaire de reconnaître sa valeur primordiale : Vous êtes. C’est votre valeur inaltérable. C’est peu de choses diront certains. C’est tout ce qu’il y a d’essentiel diront d’autres. Votre valeur fondamentale est donnée et ne concerne aucun domaine de compétence particulier et ne se prête à aucune évaluation et à aucune comparaison. Vous êtes ou vous n’êtes pas. Votre “être” ne peut être comparé à l’”être” de quelqu’un d’autre.
Se respecter commence à cet endroit. La reconnaissance de soi sans jugement ni sélection “positive” ou “négative”. La reconnaissance de soi comme un être complexe, paradoxal, juste et injuste, bon et mauvais, heureux et malheureux. Le respect intègre chacune des dimensions de qui nous sommes pour les transcender.
L’intérêt de reconnaître toute notre complexité est simple : si on se trouve en situation d’échec, cela ne nous descendra pas plus bas que terre. Nous serons en mesure de reconnaître nos erreurs sans nous faire plus de mal que nécessaire. Nous serons en mesure de reconnaître notre responsabilité, de reconnaître nos forces et nos faiblesses, de rebondir, d’apprendre et de nous engager dans un chemin qui nous ressemble.
Un autre intérêt est que nous ne sommes pas dépendants de la considération d’autrui. Nous n’avons besoin de personne pour nous respecter. C’est entre nous et nous. Cela commence maintenant.
Plus concrètement, voici comment on pourrait s’y prendre :
- Prendre conscience de nos forces et de nos faiblesses,
- Être au clair avec nos valeurs et nos principes de vie,
- Savoir prendre de la distance avec nos croyances et nos pensées quand cela est nécessaire,
- Reconnaître ses émotions sans s’y soumettre,
- Reconnaître la valeur de chacun et la dignité d’autrui,
- Connaître, respecter et défendre nos limites,
- Assumer nos choix, nos valeurs et nos actes autant dans nos succès que nos échecs.
Pour conclure, le respect de soi est une voie que vous devrez explorer un jour ou l’autre. Il ne s’agit pas de s’aimer, de se trouver super ou très compétent. Non, c’est bien plus prosaïque que ça. Il s’agit de se reconnaître et d’apprécier toute cette complexité telle un tableau d’un peintre encore inconnu, mais dont le travail fait vibrer quelque chose en nous. Quelque chose d’essentiel. Quelque chose qui est là, à sa place, au bon moment. Ce quelque chose n’est ni chaud ni froid. Il n’est ni bon ni mauvais, car il dépasse cette dichotomie. Il est ; et je le vois être, tel qu’il est ; et ça me parle.
Merci pour vos commentaires 🙂
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J’ai adoré cet article, merci Égide pour cette pépite.
Magistral. C’est un réel plaisir de lire ton article, tout est là, en toute simplicité. Bravo et merci.
Enfin, une vraie piste vers le bonheur de vivre. Aller chercher les ressources en soi-même, savoir s’appuyer sur ses propres forces. Je vais lire et relire votre article. En un mot, MERCI